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COMMENTAIRE DÉTAILLÉ - Vents, I

  

Vents, de tous les souffles                                                              

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© 2014 Saint-John Perse, le poète aux masques (Sjperse.org / La nouvelle anabase). Site conçu, écrit et réalisé par Loïc Céry.

  

Saint-John Perse                     


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Chant 1 (p. 11-12)


Le poème s’ouvre sur l’évocation directe de la dimension titanesque de ces « très grands vents » qui motivent le propos : les deux premières laisses insistent sur le caractère incommensurable des forces que génèrent ces éléments, face auxquelles les hommes sont comme laissés à la limite de leur propre force : « et nous laissaient, homme de paille, / En l’an de paille sur leur erre… ». Partout, les vents fondent leur territoire, suivant leur propre investigation (« C’étaient de très grands vents en quête sur toutes pistes de ce monde »), mais apportant pour les hommes, profondément influencés par leur souffle, une force de renouvellement (troisième laisse) – le thème est donc présent dès cette amorce du poème : « Et d’éventer l’usure et la sécheresse au cœur des hommes investis ».


Aux quatrième et cinquième laisses, intervient le motif fondateur du poème (sur lequel il va également se clore, après avoir subi toutes les mutations de la régénérescence), celui de l’arbre, symbole du langage. La « solution » en quelque sorte de cette métaphore filée de l’arbre qui appelle à de nouveaux déchiffrages, ne sera donc obtenue qu’au terme de l’itinéraire de régénération, itinéraire initiatique également, qu’amorce ce premier chant. Cet arbre du langage, rendu amorphe et asséché par tant d’usages abâtardis, est en attente face au dit poétique qui provient tout entier du souffle des grands vents (son objet est d’en exprimer la lettre).



Chant 2 (p. 13-14)


Le « Narrateur » est inspiré, ou mieux, en alerte, face à ces « très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde ». L’urgence de cette alerte correspond bien à l’urgence d’une symbiose du « Narrateur » avec ces « grands vents », induisant :

- à la première laisse, la valeur éminemment chamanique de l’inspiration poétique : « Comme un Shaman sous ses bracelets de fer »

- une parole précieuse délivrée par le Narrateur : « Et sa parole nous est plus fraîche que l’eau neuve », reprenant la notion de renouvellement possible, mais ici par la parole chamanique du Narrateur.

- L’impératif de la hâte : celle du souffle, c’est-à-dire l’urgence même de la quête : « Se hâter, se hâter ! Parole de vivant! » ; « ”Et vous avez si peu de temps pour naître à cet instant !” »

- à la deuxième laisse, le recours au déchiffrage chamanique, à travers les « rites » « favorables ».



Chant 3 (p. 15-17)


Evocation extrêmement lyrique (ici, renforcement d’un certain lyrisme par de procédés stylistiques précis, et en particulier l’énumération, si chère à Perse) des merveilles de forces dont sont capables des « très grandes forces en croissance sur toutes pistes de ce monde » : déjà abordé au premier chant, est réitéré le thème de la supériorité de ces « grandes forces » par rapport aux capacités humaines (ici, plus spécifiquement, capacités de l’esprit humain, dans son versant de rationalité). Une liberté intégrale (« Qui se donnaient licence ») détermine le mouvement de ces forces (première et troisième laisses), qui emplissent « le monde entier des choses ». Ces forces-là comportent de surcroît une dimension visionnaire (« et qui vivaient aux crêtes du futur comme aux versants de glaise du potier… »). Par cette supériorité, ces « très grandes forces » aident en quelque sorte l’action humaine, en la hissant à un niveau plus élevé. On peut donc parler d’un intercession des vents en faveur des hommes : « elles instituaient un nouveau style de grandeur où se haussaient nos actes à venir » ; « elles élevaient sur les hauteurs une querelle d’Esséniens où nous n’avions accès… »

Influencés, tenus en éveil par la force des vents, les hommes en parviennent à cultiver en eux comme un goût du dépassement (deuxième laisse), suscitant des « idées nouvelles » ainsi que « murmure et chant d’hommes vivants ».


La première laisse de la deuxième strophe s’organise autour d’une énumération descriptive (ou « énumération homologique », selon l’appellation que lui en donnèrent Roger Caillois et l’un des commentateurs les plus avisés de Perse, le philologue belge Albert Henry – sur le modèle de l’énumération d’Anabase, X) : ici, il s’agit de recenser en somme tout ce que « dispersent » ces forces : « Et dispersant au lit des peuples… »


Aux deuxième et troisième laisses, il s’avère que ces « forces », dans leur intensité salvatrice et leur capacité de dispersion de tout l’ordre ancien, sont porteuses d’un sens qu’il s’agit de décrypter : « Ainsi croissantes et sifflantes, elles tenaient ce chant très pur où nul n’a connaissance. » ; « elles éveillaient pour nous, (…) / Les écritures nouvelles encloses dans les grands schistes à venir … ». Et ce décryptage, ce déchiffrage profond, le poète en a l’ambition, identifiant sa mission à l’interprétation des signes cachés : « j’écouterai monter en moi l’autorité du songe » ; « Ivre, plus ivre, d’habiter / La mésintelligence ».



Chant 4 (p. 18-19)


Le rejet de la prétendue connaissance archivée que représentent les livres, et le projet de l’élaboration d’un savoir nouveau. Ce projet d’édification, par le déchiffrage, d’une nouvelle interprétation du monde («Tout à reprendre. Tout à redire. Et la faux du regard sur tout l’avoir menée ! »), implique un regard neuf, véritable investigation d’une vérité cachée et plus profonde que celle qui a été atteinte par la connaissance rationnelle. Cette investigation amène la nécessité d’une exploration de territoires nouveaux, un départ, et l’appel en est réitéré : « S’en aller ! s’en aller ! Parole de vivant ! ».

Ce rejet des livres, représentant les couches sédimentées d’une « supercherie » : tout le chant décline ce thème par l’image des bibliothèques porteuses d’une connaissance trompeuse.



Chant 5 (p. 20-21)


Tout le passif humain est relativisé, en une entreprise qui se poursuit, ainsi cette idée étonnante de la « mésintelligence » est-elle précisée, il s’agit de la charge de l’ « Enchanteur » (fin du chant), cet « Homme très libre et de loisir, dans le sourire et la bonne grâce, / Le ciel pour lui tient son écart et sa version des choses. » Il se situe dans l’inspiration du vent (« prend conseil de ces menées nouvelles au lit du vent »). Ce projet de la mésintelligence qui implique la quête est disproportionné : « Eâ, dieu de l’abîme, ton bâillement n’est pas plus vaste ».

Comme le signifie la première laisse, une fois débarrassé des scories et des illusions des livres, le poète peut commencer son investigation, dans le commerce des forces pures des vents : « Les livres au fleuve, les lampes aux rues, j’ai mieux à faire sur nos toits de regarder monter l’orage. » ; « Vous qui savez, rives futures, où résonneront nos pas » : après la répudiation de la superficialité d’une connaissance déchue, adresse directe aux « rives futures », impliquant le registre du visionnaire, l’investigation. A la deuxième laisse, intervient une scène puissamment symbolique où est évoquée la femme nue et couchée, qui évoque peut-être un rite, un augure aidant au déchiffrage qui est en jeu dans l’investigation entreprise.



Chant 6 (p. 22-26)


Première strophe : le point de quintessence auquel les vents hissent les hommes implique tout d’abord au sein de la deuxième laisse, le retour de la notion de fondation d’une nouvelle réalité plus haute et de l’annulation de l’ordre ancien, comme le signifie bien le registre utilisé ici : « ”Ah ! oui, toutes choses descellées ! Qu’on se le dise entre vivants ! / ”Aux bas quartiers surtout – la chose est d’importance. / ”Et vous, qu’allez-vous faire, hommes nouveaux, des lourdes tresses dénouées au front de l’heure répudiée ? » Intervient alors une mention très importante pour le poème, celle du rejet d’une certaine idée du songe, conçu comme exercice gratuit, purement esthétique : « ”Fini le songe où s’émerveille l’attente du Songeur. / ”Notre salut est dans la hâte et la résiliation. L’impatience est en tous lieux. Et par-dessus l’épaule du Songeur l’accusation de songe et d’inertie. » Face à cela, s’impose la conception de l’investigation poétique comme quête primordiale, urgente (« hâte » ; « résiliation » : « impatience »).


Troisième laisse : les hommes qui peuvent relever le défi de cette haute réalité à laquelle convient les vents, ce sont les « Enchanteurs », bien différents des Songeurs, répudiés précédemment. Ceux-là doivent amener une nouvelle ère, et la confiance est dans leur pas : « ”Nous avons mieux à faire de leur force et de leur œil occulte. / ”Notre salut est avec eux dans la sagesse et dans l’intempérance. »


Quatrième laisse : en dépit de la coutume, cette nouvelle dimension doit s’imposer à l’homme comme étant son nouveau destin, lié d’ailleurs à une réelle « contrainte », comme l’illustre la mention toute nietzschéenne : « Et si un homme auprès de nous vient à manquer à son visage de vivant, qu’on lui tienne de force la face dans le vent ! »


Cinquième laisse : Reprise du thème de la présence d’un sens caché dans le vent, sens transmis par leur souffle et par l’intercession de ceux qui choisissent de se hisser au niveau du message déchiffrable, signifiant bien que c’est l’action humaine qui peut être anoblie et rehaussée par cette force du vent : « Les dieux qui marchent dans le vent ne lèvent pas en vain le fouet. / Ils nous disaient – vous diront-ils ? – qu’un cent d’épées nouvelles s’avive au fil de l’heure. »


Sixième laisse : par une adresse directe à tous les intercesseurs de cette force, insistance sur l’inspiration profonde de l’action que représente les vents – avec la réitération du rejet de la seule invitation au songe (« ”Divinités propices à l’éclosion des songes, ce n’est pas vous que j’interpelle, mais les Instigatrices ardentes et court-vêtues de l’action. »), et sur l’intensité de leur force, qui se déploie jusqu’à la violence revendiquée aussi pour cette investigation (encore le relais nietzschéen) : « ”Nous avançons mieux nos affaires par la violence et par l’intolérance. »


Septième laisse : Aspiration, encore à cette très haute réalité promise par les vents, avec une symbiose des hommes en course vers leur règne : « Nos revendications furent extrêmes, à la frontière de l’humain. » Notion si profondément ancrée chez Saint-John Perse, et que l’on retrouve partout dans l’œuvre (avec des variations signifiantes elles-mêmes), des limites humaines sans cesse repoussées : « Nous nous levons avec ce très grand cri de l’homme dans le vent (…) Qu’on se lève de partout avec nous ! Qu’on nous donne, ô vivants, la plénitude de notre dû ! ». Une aspiration humaine exacerbée, exigence d’une restitution de la plénitude de l’être (le thème apparaît aussi dans « Pluies »).


Deuxième strophe : Reprise de la notion de bouleversement des anciens repères. A la première laisse, le sens ancien étant caduc, il doit en être trouvé un nouveau : « Ha ! oui, toutes choses descellées, ha ! oui, toutes choses lacérées ! ». C’est à la deuxième laisse que se confirme l’énergie, l’enthousiasme de la conquête de ce nouveau sens, pour cette édification d’une nouvelle ère – ainsi, le motif de la hâte est réitéré (« Se hâter, se hâter, parole de vivants » ; « ne voyez-vous pas, soudain (…) qu’il est temps enfin de prendre la hache sur le pont ?… » L’enthousiasme s’amplifie encore à la troisième laisse, car il s’agit de l’énergie de la suppression des anciens carcans et de l’ouverture de nouveaux horizons : « ”Enlèvement de clôtures, de bornes ! Semences et barbes d’herbe nouvelle ! (…) ”Se hâter, se hâter ! l’angle croît !… Et dans l’acclamation des choses en croissance, n’y a-t-il pas pour nous le ton d’une modulation nouvelle ? » Revient alors le motif de la violence de cet avènement-là, où maintenir l’homme coutumier dans de nouvelles contraintes de la quête (réitération du registre éminemment nietzschéen de la quatrième laisse de la première strophe) : « ”Et si l’homme de talent préfère la roseraie et le jeu de clavecin, il sera dévoré par les chiens ?” »


Troisième strophe : dans la mesure où cet ordre de la quête et de l’avènement d’un ordre nouveau est initié, satisfaction du Poète face à ce bouleversement, car ses prévisions, ses intuitions sont réalisées. « Apaisement au cœur du Novateur ». Une grande confiance parcourt la strophe – confiance en cette quête elle-même, et dans la quintessence des forces incarnées dans les vents. On l’a dit, les limites humaines se trouvent repoussées, mais l’idée est encore accrue et comme précisée ici : c’est bien l’âme qui se retrouve en état d’insurrection, impliquant une domination radicale de l’esprit sur la chair, et donc un dépassement de la condition humaine elle-même : « ”Les revendications de l’âme sur la chair sont extrêmes. Qu’elles nous tiennent en haleine ! Et qu’un mouvement très fort nous porte à nos limites, et au delà de nos limites ! »


Quatrième strophe : continuation de l’exposition de cette sorte de réalisation qui est déjà atteinte par cette inspiration des hommes par le vent, avec l’élément de la « continuité de fait humain » en quelque sorte : « ce grand mouvement des hommes vers l’action » ; « cet autre mouvement plus vaste que nôtre âge ! » Le Poète quant à lui demeure vigilant, en cette position qui lui est propre, celle de l’attention aux éléments naturels et à leur enseignement : « et le Poète tient son œil sur de plus pures laminaires. »



Chant 7 (p. 27-28)


Les aspirations des hommes inspirés par le vent sont réelles ; la vacuité et le caractère passager des forces humaines génèrent certaines exigences. Les aspirations humaines, une fois qu’en termes ontologique, existentiel, spirituel, les hommes se sont retrouvés inspirés par ce déferlement des vents – ces aspirations sont les plus profondes et les plus fortes.


Première laisse : ces forces sont liées à cette insurrection de l’âme qu’on a vue se révéler précédemment, mais y intervient le doute et la faiblesse (celle qui est provoquée par l’effacement des forces du vent lui-même : le vent peut lui aussi s’éclipser) : « … Eâ, dieu de l’abîme, les tentations du doute seraient promptes / Où vient à défaillir le Vent… » C’est cette disparition possible du vent qui rend favorable l’éclosion du doute et l’intervention de la faiblesse. L’homme, pour son salut, est donc redevable de la présence et de la persistance des forces ceintes dans le vent. « Mais la brûlure de l’âme est la plus forte, / Et contre les sollicitations du doute, les exactions de l’âme sur la chair / Nous tiennent hors d’haleine, et l’aile du Vent soit avec nous ! » : C’est en vertu de cette présence du vent que la domination de l’âme sur la chair est rendue possible, induisant un dépassement pour l’homme, de sa propre condition, de ses propres limites.


Deuxième laisse : pour pérenniser « la plénitude de ce chant (celui de poème lui-même, réceptacle de l’aspiration qui se joue là), le Poète veut recourir à l’énergie de toute cette insurrection de l’âme : « Ce n’est pas trop, Maître du chant, de tout ce bruit de l’âme ». Et le recours s’initie y compris dans la faveur (paradoxale pourrait-on dire de prime abord) apportée par le malheur, qu’il faut comprendre certainement ici comme l’annulation de l’ordre abâtardi du bonheur qui découle de la satisfaction minimale, restreinte : « au croisement des fiers attelages du malheur, pour tenir à son comble la plénitude de ce chant » Le thème sera repris et développé plus loin dans le poème.


Troisième laisse : minorisation volontaire, dans tout cet enjeu qui se développe, du poids réel, du rôle préconçu du Poète : « ”Je t’ai pesé, poète, et t’ai trouvé de peu de poids ». C’est donc la réalité visée par le poème qui, seule, compte, et un rôle prédéterminé du poète doit être dépassé : tout comme l’arbre du langage du début du propos, ce rôle doit être rénové en cours de route, par les forces « en croissance » sur la scène que nous donne à voir le déroulement du poème. C’est, ensuite, la grandeur elle-même, que l’on croyait acquise, qui vient à défaillir : « ”Je t’ai louée, grandeur, et tu n’as point d’assise qui ne faille. » Tout vient à défaillir, tout est passager dans cet accès lui-même, et les forces humaines déclinent, fussent-elles représentées par des mains impériales : « ”Ta main prompte, César, ne force au nid qu’une aile dérisoire. »

D’où certaines exigences radicales, qui s’imposent. Les exhortations convoquant le souvenir de la grandeur et de la force des vents ont pour but de toujours maintenir l’homme au plus haut degré d’exigence : « Couronne-toi, jeunesse, d’une feuille plus aiguë ! » c’est effectivement l’heure des exhortations, et les quatrième et cinquième laisses y sont consacrées. Tout ce qui peut contrer la force pure des vents est répudié : « ”Et toi, douceur, qui vas mourir, couvre-toi la face de ta toge / ”Et du parfum terrestre de nos mains…” » ; « Et moi j’ai dit : N’ouvre pas ton lit à la tristesse. »


Cinquième laisse : conscience de la finitude du destin humain face à l’éternité de la force des vents : « Le Vent s’accroisse sur nos grèves et sur la terre calcinée des songes ! / Les hommes en foule sont passés sur la route des hommes, / Allant où vont les hommes, à leurs tombes. »

Sixième laisse : face à cette précarité du destin humain, le Poète est déterminé à demeurer fidèle à cette force du vent – « Je mènerai au lit du vent l’hydre vivace de ma force, je fréquenterai le lit du vent comme un vivier de force et de croissance. » Se tenir en cette proximité des forces pures est donc la fonction la plus haute du Poète (et non dans la foi d’une fonction préconçue, qui défaille fatalement).

Intervient alors en fin de chant une scène d’une grande puissance symbolique, liée à une codification précise de la valeur chamanique du cheval (se référer au commentaire de Saint-John Perse sans masques et aux analyses de Mireille Sacotte dans Parcours de Saint-John Perse ; cf. aussi Roger Caillois, Poétique de Saint-John Perse, p. 55 – voir bibliographie). Dans le déroulement du poème, la scène avait été « préparée » en quelque sorte en tout cas anticipée à la fin du chant 2, p. 14 : « Ou bien un homme s’approchant des grandes cérémonies majeures où l’on immole un cheval noir. » La cérémonie dont il était question à la fin du chant 2 s’est en fait poursuivie et on a abouti au sacrifice de ce « cheval noir ». On ne comprend réellement la valeur symbolique et la signification profonde de ce rite sacrificiel qu’après toute l’exposition dont la première partie du poème a été le théâtre, de la force des vents, et de leur puissance de rénovation : il s’agit en fin de compte d’une cérémonie ayant pour but le ressourcement obtenu à travers le rite, le renouvellement ontologique rendu possible par le contact avec les vents (et ici, par cette « cérémonie majeure » où le cheval noir, avec sa charge propre dans les rites de divination, occupe la place centrale). Puis, reprise de l’exhortation constamment renouvelée, véritable leit motiv : « S’en aller ! s’en aller ! Parole de vivant. » L’exigence de se maintenir au degré d’énergie signifié par toute cette première partie est incarnée dans cet appel au départ, dans le souffle du vent.